Les personnes possédant une variation au niveau du sexe phénotypique, chromosomique ou gonadique sont dites ‘intersexes’. Ces variations peuvent être observables dès la naissance (structures chromosomique et hormonale, organes génitaux internes et externes), ou devenir apparentes plus tard au cours de la vie (pilosité, masse musculaire, poitrine, stature, etc.).
Ces variations sont diverses et variées, et dans l’immense majorité des cas, elles ne mettent pas en cause la bonne santé des personnes intersexes. Elles constituent des variations naturelles du développement sexuel.
Pour autant, les caractéristiques sexuelles des personnes intersexes ne correspondent pas aux normes sociétales, essentiellement binaires, qui régissent l’assignation d’une identité masculine ou féminine.
De cette divergence entre les normes sociétales et les caractéristiques sexuelles des personnes résulte une pression sociale et médicale, qui se traduit dans l’immense majorité des cas par des pratiques normalisatrices néfastes telles des mutilations génitales, des traitements médicaux non consentis, des injonctions de modification de ces caractéristiques et des injonctions de comportement. Ces pratiques normalisatrices sont illicites, pénalement punissables et contraires aux droits fondamentaux ainsi qu’à l’éthique médicale.
Premièrement, les démarches de modification des caractéristiques sexuelles des personnes intersexes se traduisent essentiellement par des interventions physiques de nature médicale, et cela en dépit du fait que les personnes concernées sont, pour l’immense majorité, en bonne santé physique. De telles interventions constituent des atteintes à l’intégrité physique, dès lors qu’elles ne sont pas justifiées par des impératifs de santé et ne font pas l’objet du consentement des personnes.
Deuxièmement, les traitements appliqués aux caractéristiques sexuelles phénotypiques des personnes intersexes sont régulièrement appliqués très précocement, y compris à des nourrissons, bien avant que le consentement éclairé soit envisageable. La littérature médicale témoigne de ces pratiques.
Troisièmement, dans tous les cas où les interventions modificatrices des caractéristiques sexuelles ne répondent à aucune nécessité de santé physique, ces interventions sont justifiées par des spéculations sur les difficultés d’adaptation sociale qu’encourraient, dans le futur, les personnes concernées, en raison d’une assignation sexuelle ou de genre ambiguë. Une telle justification est à l’évidence nulle dès lors qu’elle s’applique à des enfants ne pouvant consentir, et dont l’identité de genre ne s’est pas encore exprimée.
Quatrièmement, l’identité de genre d’une personne est un construit psycho-social relevant de l’auto-détermination de la personne et non pas une donnée biologique/innée. Le sexe d’une personne est une donnée biologique, une donnée médicale à caractère personnel, basée sur l’observation du phénotype, de la structure hormonale ou génétique des caractéristiques sexuelles. Les identités de genre sont nombreuses, multiples, fluides et ne sont donc pas nécessairement congruentes aux sexes. La classification binaire des sexes ne reflète pas adéquatement la réalité et est particulièrement nuisible pour les personnes intersexes.
L’ensemble de ces constats met en évidence une application défaillante des principes de la législation belge concernant notamment les droits des patients, qu’un écart par rapport aux normes sociétales ou aux conventions médicales ne saurait en aucun cas justifier.
La présente résolution a donc pour objet d’adapter la législation belge et d’encadrer la pratique médicale afin de garantir les droits fondamentaux aux personnes intersexes.