Ventriloque, jongleuse et manipulatrice d’objets hors-pair, Jeanne Mordoj s’affiche en femme à barbe, reine du freak show ! Pour aborder sans complexe un tabou de la féminité : la pilosité. Vêtue d’un tailleur, un crêpe noir sur le visage, la facétieuse jeune femme dévoile fièrement une barbe exubérante, faisant de cette singularité une arme fatale contre la bienséance, le « lisse ».

Avec un art consommé de la dérision, jouant de nos rêves et de nos cauchemars, elle jongle avec les coquillages, laisse des jaunes d’oeufs danser sur son corps, fait bruisser des coquilles d’escargots, converse avec des crânes d’animaux.
Devant une assistance saisie, Jeanne Mordoj brosse avec insolence et malice, un hymne à la féminité doublé d’un regard sur la nature humaine.

Ca ressemble à quoi cette affaire là, ça penche vers quoi, plutôt du féminin ou plutôt du masculin ? Ici la réponse est catégorique, une femme à barbe est d’abord une femme et c’est d’ailleurs bien de cela, de ce qu’est être une femme aujourd’hui, que semblait vouloir nous parler Jeanne Mordoj avec sa barbe et ses histoires de pilosité. Nous parler, en son nom propre, s’appuyant sur ses ressources - son corps, ses savoirs circassiens, ses techniques foraines, ses expériences de vie, sa bizarrerie-, de l’étrange, de l’effroi, du rire et de l’illusion, du sexe, de sexe et des finitudes.
Télérama, Daniel Conrod